lundi 30 mars 2020

Benzos





paru le 14 novembre 2019 aux éditions Taurnada, 222 p., 9, 99 euros.



Vous est-il déjà arrivé de vous réveiller avec cette sensation de déjà-vu ?
Sauriez-vous faire la différence entre le vrai et le faux ?

Avez-vous une confiance absolue en vos proches ?
Nick semble mener une vie tranquille, entouré de sa femme et de ses voisins. Pourtant, le jour où des amis de longue date arrivent, son existence tout entière va basculer dans l'étrange et l'impensable.
Réalité ? Psychose ? Quelle preuve avez-vous finalement de votre réalité ?








L'auteur
Crédit photo : © Cécile Plessis


Né à Toulouse en 1974, Noël Boudou a travaillé auprès de personnes âgées et vit aujourd’hui près de Cahors. 
Depuis l'âge de 16 ans, chanteur dans divers groupes allant du hard-rock au death metal, écrire ses textes de chansons lui donne un jour l'envie de s'essayer à raconter des histoires. 
Fan de Jim Thompson, Joe R. Lansdale et David Peace, c'est tout naturellement qu'il se tourne vers le roman noir. Son premier livre, Elijah (Flamant Noir), remporte le prix du Roman Noir 2017 lors du Festival de Cognac.






La Chro de Flo

Une histoire singulière, avec en toile de fond les psychotropes, leurs effets et leurs conséquences.

Ce roman que je qualifierais de thriller par la tension qu’il sait créer au fil des pages a dès sa parution capté mon attention. Noël Boudou, son auteur a expliqué dès le départ qu’il a souhaité écrire sur ce thème car il s’est lui-même retrouvé dépendant de substances a priori supposées régler certaines de nos difficultés mais pouvant hélas nous pourrir la vie et la santé.

Nick Power travaille et vit avec Chloé. Il habite une maison entourée de quelques voisins. Une vie banale, qui paraît plutôt agréable. D’autant plus que son meilleur ami, Pierre et sa femme, Catherine, ont prévu de lui rendre visite. Cela tombe bien, cela fait 3 ans qu’ils ne se sont pas vus. La compagne de Nick travaille pour un laboratoire pharmaceutique et doit hélas s’absenter pour quelques jours pour raisons professionnelles.
Nick se retrouve seul pour accueillir ses amis. Et là, des événements étranges vont se produire et entraîner Nick et nous autres lecteurs, dans une aventure pour le moins éprouvante.
Car Nick a la fâcheuse habitude d’avaler les médicaments comme d’autres gobent des Tic Tac, et l’alcool n’est pas en reste. Très rapidement une spirale infernale va se mettre en place. Ses invités qui arrivent, une nuit torride avec la femme de son meilleure ami et le lendemain, plus personne ! Pire, l’arrivée le lendemain de ces mêmes amis comme si c’était la première fois !
Nick va essayer de comprendre, menant une sorte d’enquête auprès de son voisinage, pour tenter de savoir s’il a tout imaginé ou s'il est victime d'une machination.
Avec un nombre de personnages restreints, une répétition des événements, on pourrait craindre de s’ennuyer, mais l’écriture est vive, les mots sont choisis avec pertinence pour nous mettre dans la peau de Nick. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on ne s’y sent pas très bien, plutôt oppressés, angoissés, confus, perdus. Voilà comment moi, en tout cas, je me suis sentie.
Noël Boudou nous invite en effet à plonger dans une expérience sensorielle, psychologique, intellectuelle très particulière. J’ai trouvé ce roman particulièrement fort, terriblement humain et courageux, et l’on ne peut rester insensible à la souffrance qui s’écrit en filigrane tout au long de ces pages, souffrance de ne pouvoir vivre, dormir normalement et de basculer dans la dépendance avec l’accord tacite mais aussi culpabilisant du corps médical et pharmaceutique.


Si vous recherchez une lecture originale, alors je vous recommande ce roman plus que chaudement.


lundi 2 mars 2020

Miracle

paru aux éditions Cosmopolis le 17 octobre 2019


La vie de Laure, vingt-et-un ans, s'écroule lorsqu'elle apprend qu'elle est atteinte d'une tumeur incurable au cerveau. Les médecins sont formels : la jeune femme est condamnée. Mais Laure est une battante, et grâce aux réseaux sociaux, récolte des fonds pour se lancer dans un projet fou : celui de traverser l'Atlantique en solitaire. Très vite, les internautes se prennent de passion pour cette jeune malade que d'aucuns voient comme une héroïne des temps modernes. Elle est invitée sur les plateaux de télévision, son périple est suivi sur YouTube par des centaines de milliers d'abonnés. Adulée, elle devient un symbole d'espoir et un modèle de courage. Dans sa course contre la montre, Laure pense avoir trouvé un sens à sa vie, mais une question parmi d'autres se pose : quel est le prix d'un miracle ?
Conduite pied au plancher, Miracle est l'histoire aux rebondissements en rafale d'une chute libre dans l'enfer des réseaux sociaux, qui va emporter Laure au cœur de la nuit, loin, beaucoup trop loin... Là où le lecteur n'a plus de répit.

La chro de Flo


Solène Bakowski est une auteure que j’ai rencontrée pour la première fois en mai dernier, lors de la première édition de l’Escargot Noir à Sens.

Immédiatement son sourire, la douceur qu’elle dégage m’ont fait m’arrêter à sa table et échanger avec elle. J’ai acheté « Une bonne intention » qui a rejoint ma PAL, puis quelques temps plus tard, « Un sac » que j’ai lu en premier, pour respecter l’ordre de parution ; et là coup de cœur pour l’écriture de Solène et l’histoire incroyable de son héroïne.
Début novembre, j’ai eu la possibilité de me rendre au salon de l’Iris Noir à Bruxelles et de retrouver Solène Bakowski pour la sortie cette fois-ci de Miracle.

Une fois de plus, je me suis laissée happer par l’histoire de Laure, jeune femme à qui les médecins diagnostiquent une tumeur au cerveau avec une espérance de vie de 2 à 3 ans.
Laure se retrouve poussée dans ses derniers retranchements par cette funeste échéance et la question lancée par sa sœur Axelle : « Tu vas faire quoi, du coup ? ».
Donner un sens à ce qui reste de la vie, réaliser un rêve qui dormait enfoui tout au fond de soi, c’est ce que nous ferions tous, placés dans une telle situation. Et Laure va poster sur les réseaux sociaux ce challenge de traverser l’océan atlantique. Un clic anodin en apparence mais qui va générer une incroyable déferlante pas seulement dans sa vie.
J’ai dévoré ce roman, je l’ai terminé en quelques jours, et une fois de plus, je suis restée scotchée, hantée par cette histoire. J’ai refermé le livre complètement chamboulée début décembre et j’y pense encore souvent.

Les mois qui se sont écoulés ensuite n’étaient pas opportuns à un retour, mais le temps est enfin venu de restituer mon avis à travers ces quelques lignes.
Miracle est un thriller complètement en prise avec notre époque car il aborde  la place trop grande que prennent les réseaux sociaux dans nos vies, qu’ils peuvent parfois faire basculer du jour au lendemain.

À travers sa construction originale : des extraits de conversations sur twitter, des chapitres consacrés à Laure avec en introduction le décompte de ses abonnés FB, YouTube, Instagram, etc., des chapitres portés par d’autres protagonistes (Isabelle, la maman du jeune Lucas atteint lui aussi d'un cancer, Doris, la sœur de celle-ci, Lionel, si investi auprès des enfants malades ...), le rythme s’accélère, la tension monte jusqu’à la fin de ce thriller pas comme les autres.

Solène Bakowski nous démontre brillamment que les réseaux sociaux sont sans réels filtres, capables de susciter des sentiments extrêmement forts, d’amour comme de haine, d’engendrer le meilleur comme le pire, qu’il y règne des profiteurs, que rien n’est gratuit et que même les meilleures intentions peuvent devenir les complices involontaires de drames hélas bien réels.

Si vous ne l’avez pas déjà lu, je vous recommande plus que chaudement ce roman, qui se dévore à vitesse grand V et qui, plusieurs mois après sa lecture, reste un immense coup de cœur.


Un extrait 
Le lendemain, dès l’aube, elle surfe. Le reste de la journée, elle ramasse des coquillages. Le surlendemain, elle accueille ses nouveaux stagiaires pour la semaine, leur montre les rudiments, et continue à ramasser ses coquillages. Idem le jour suivant, surf, élèves, cours, flots, vagues, embruns, vent dans ses cheveux, la sidération comme un couvercle sur ce décor. Et des coquillages. Beaucoup de coquillages.
Quand le nombre de sept-cent-trente est atteint, elle les verse dans un grand bocal transparent. Les trois-cent-soixante-cinq suivants, elle les peint en rouge. C’est du rab, pense-t-elle en les transvasant dans le bocal. La troisième année.
Elle en retire ensuite trois, trois petites coquilles qui tiennent dans sa paume, et elle les met dans un autre bocal, vide celui-là. Ding. Ding. Ding. Trois jours ont passé depuis l’annonce.
Le bocal des terminés. Le bocal des à venir.
Sept-cent-trente jours, et trois-cent-soixante-cinq supplémentaires. Pour la troisième année dont, peut-être, l’existence lui fera l’aumône.
Ding. Ding. Ding.