mercredi 6 novembre 2019

La trahison des Jacobins de Jean-Christophe PORTES



publié le 10 octobre 2019 aux Editions City, 400 p., 24x 16 cm

Été 1792. Alors que l’armée austro-prussienne menace Paris, le lieutenant Victor Dauterive se préoccupe surtout de la disparition de Joseph, son petit serviteur. Le garçon a été enlevé et a sans doute disparu dans l’enfer de Bicêtre, la prison des fous, des voleurs et des enfants…

Mais une autre mission l’éloigne de ses recherches lorsqu’un policier, qui s’intéressait à une affaire de corruption dans l’entourage de Danton, est retrouvé assassiné. Ce n’est que le premier d’une série de meurtres qui continue avec celui de la femme de chambre de Marie-Antoinette et qui laisse présager le pire.

Entre trahisons, complots et espionnage, Dauterive va devoir mener une nouvelle enquête à haut risque. À l’heure où se prépare l’invasion des Tuileries, il va devoir choisir son camp… et tenter de survivre


La Chro de Flo 


La trahison des Jacobins est la cinquième enquête de Victor Dauterive, personnage fictif créé par Jean-Christophe Portes et formidable jeune lieutenant de gendarmerie qui nous permet de découvrir les dessous des années pleines de tumulte qui suivirent la Révolution française.

Victore Dauterive est maintenant âgé de 20 ans. La Fayette qui a joué un rôle important dans sa vie et dans les premiers volumes est absent de celui-ci. Victor Dauterive est sollicité par Charpier un personnage influent, ancien graveur, devenu commissaire et récemment député membre du Comité de surveillance de l’Assemblée nationale pour enquêter sur la mort de Bachelu, un policier, survenue aux Bains poitevins, une péniche amarrée en bord de Seine.
Victor Dauterive s’est lancé en parallèle dans une autre recherche, beaucoup plus personnelle, celle de Joseph, son jeune serviteur, blessé par Dossonville, juge de paix, ami de Danton, membre des Cordeliers et ennemi de Victor. Joseph a été emmené à Bicêtre, lieu qui accueille tous les individus, mineurs comme majeurs, handicapés comme aliénés ou voleurs.
Victor Dauterive va devoir batailler ferme et devra recourir à l’aide de sa fidèle amie, Olympe de Gouges, pour que les portes de Bicêtre s’ouvrent et que la vérité se dévoile progressivement.

J’ai été tenu en haleine pendant toute cette nouvelle aventure qui débute un mardi 10 juillet 1792 et s’achève le 26 août de la même année. Victor Dauterive est jeune, impulsif, sensible mais aussi courageux et intuitif. Il est profondément attachant tout comme le sont les personnages principaux qui l’aident dans ses enquêtes, qu’ils aient vraiment existé ou soient fictifs : formidable Olympe de Gouges, femme qui n’a de cesse de faire bouger les lignes d’une société éminemment phallocrate, en n’hésitant pas à prendre la parole au milieu des tribunes masculines pour revendiquer des droits aux femmes de voter, de divorcer, etc.
Formidable Duperrier, homme plein de sagesse et formidable cuisinier, auprès duquel Victor Dauterive trouve conseils et réconfort.
Vous rencontrerez ou entendrez parler de Fragonard, Marat, Camille Desmoulins, Restif de la Bretonne, Robespierre et Danton bien sûr, et d’autres encore.

Mais surtout dans ce roman, deux noms ont raisonné plus particulièrement à mes oreilles, il s’agit de La Salpétrière et de Bicêtre, qui sont pour les Parisiens des établissements de santé emblématiques. Leur histoire est bien plus complexe et leur rôle se révèle bien ambigu, puisqu’ils ont tout d’abord permis de retirer des rues et des maisons de Paris les individus, enfants comme adultes dont personne ne souhaitait s’encombrer sans pour autant s’acquitter d’une mission de soins.
Jean-Christophe Portes aborde également des thèmes plus durs, comme ceux de l’enlèvement des enfants à des fins de prostitution enfantine ou de filière pédo-pornographique.
La découverte des méthodes d’hygiène en vigueur à cette époque (toilette à sec, bains poitevins, maisons de bain) m’a particulièrement intéressée et l’auteur nous livre de façon très réaliste le quotidien des personnes de l’époque, que cela soit en matière d’alimentation (on boit du vin à toute heure, l’eau s’avérant sans doute plus néfaste pour la santé !) que d’habitat et de tenues vestimentaires. 

Les dessous politiques sont particulièrement captivants et montrent à quel point les années qui suivirent la Révolution Française ont été de véritables moments où se sont livrées des joutes politiques qui furent à l’origine des plus grands bouleversements de l’Histoire de France moderne.

N’oubliez enfin surtout pas de lire les 12 pages de notes réalisées par l’auteur. Elles vous donneront des informations passionnantes sur les recherches effectuées par Jean-Christophe Portes pour cette période historique. Elles vous conforteront dans la conviction que l’auteur a fait un travail de recherche mais aussi de rédaction romanesque absolument exemplaire, nous livrant un tout d’une grande richesse narrative, entre roman policier, roman d’aventure, fresque historique, politique et sociétale !

L'auteur





Né en 1966 à Rueil-Malmaison, Jean-Christophe Portes entame des études à l'Ecole Nationale de Arts Décoratifs, avant de se tourner vers le journalisme. Il a réalisé une trentaine de documentaires d'investigation, de société ou d'histoire pour les principales chaînes de télévision, avant de poser son sac et de se lancer dans l'écriture.
Lancées en 2015, les « Enquêtes de Victor Dauterive » connaissent un succès grandissant. Elles mettent en scène un jeune officier de gendarmerie sous la Révolution. La série compte aujourd'hui cinq épisodes : L'affaire des corps sans tête, L'affaire de l'homme à l'escarpin (prix polar Saint-Maur en poche 2018), La disparue de Saint-Maur, L'espion des Tuileries, et bien sûr ce tout nouvel opus, La trahison des Jacobins.
Cette plongée dans la Révolution française renouvelle les codes du genre alliant le thriller, la tragédie historique minutieusement reconstituée, et l’évolution personnelle du héros et de son entourage. Elle mêle les personnages de fiction et historiques dans cette période encore peu exploitée par la fiction sur la durée.

mercredi 23 octobre 2019

La lame

publié le 29 mai 2019 aux Editions Metropolis, 512 p., 21 euros, 24x 16 cm, 21 euros

Dans une France proche et obscure à la cité de La Solidarité, quartiers nord de Marseille : l'officier de PJ Simon Mardikian découvre le cadavre ravagé d'une jeune prostituée noire, Joy, alias Queen, sans identité définie. Son enquête sur les réseaux mêlant drogues, migrants et traite d'êtres humains ne fait que commencer. 
Le lendemain, à Lagos, capitale du Nigéria, dans le bidonville flottant de Makoko, l'instituteur Sékou Williams tient tête au dealer Kaza qui cherche à recruter des revendeurs parmi ses élèves. Mais soudain s'abat une immense vague-submersion, dispersant des milliers de réfugiés à travers le continent africain. 
Au même moment, à l'Élysée, le président de la République Bako Jackson annonce sa candidature à sa propre réélection. Il en profite pour dévoiler le renforcement du dispositif Frontex. C'est sa fermeté sur les questions migratoires qui a valu à ce fils de pasteur nigérian de ravir le pouvoir à l'extrême droite en 2027. À peine a-t-il achevé son allocution qu'on lui annonce la catastrophe climatique de Lagos. 
Ces trois histoires ne vont pas tarder à se rencontrer, d'une manière qui pourrait bien changer le monde. 
Ce qui va les réunir ? Une lame, rien qu'une lame, qui déjà déferle et emporte tout sur son passage... 

Basé sur les prospectives des plus éminents spécialistes des mouvements migratoires, La Lame vous propulse dans un thriller politique haletant où les lignes entre le réel et la fiction se brouillent jusqu'à devenir une seule et même piste.


La Chro de Flo 
La lame dès les premiers chapitres taille dans le vif : ça tabasse, ça fait mal, c’est saignant, violent. On pourrait se croire dans l’univers cher à Mattias Köping (un très  bon point) : le meurtre particulièrement sordide d'une prostituée sans identité, de sombres histoires de traite des femmes, de drogue, de dealers dans une cité marseillaise,  la Soli (son surnom, car le nom complet,  La Solidarité est bien mal choisi) mais très vite l'auteur va orienter son thriller autrement.

Frédéric Mars nous invite à un « drôle » de voyage : en premier lieu, un voyage dans le temps, puisque  le roman débute en octobre 2031. 2022, écrit Emmanuel Macron. Après la victoire du parti d’extrême droite, La France aux Français, et la gouvernance calamiteuse de sa représentante, Laurence Varenne, le nouveau président français élu en 2027 est un homme noir, de souche africaine : Bako Johnson. Dernière ligne droite avant les prochaines élections : autant le dire, cette période est un chaudron bouillant où les décisions pèsent lourd dans la balance électorale et la période propice aux attaques.
2031, c’est demain. Et les références à notre actualité sont bien présentes : le président actuel, Emmanuel Macron, l’extrême gauche avec Jean-Luc Mélenchon, etc. Vous entendrez même parler des gilets jaunes et pas seulement. Et avec un peu d’imagination, si peu, on imagine très bien que cette France de demain n’est pas de la science-fiction mais une très légère anticipation.
Voyage disais-je. Nous allons aussi voir du pays. L’échiquier sur lequel Frédéric Mars nous propose de jouer ne se limite pas à notre pays, c’est l’échiquier mondial qui est convoqué et plus particulièrement le continent africain, avec le Nigéria et sa capitale Lagos, ville qui peut hélas revendiquer sa place de capitale de la misère. Lagos, si vous avez regardé les actualités récemment, a fait parler d’elle avec le démantèlement d’une « usine à bébés » dans laquelle des femmes étaient retenues jusqu’à l’accouchement et leurs  nourrissons monnayés. 
En 2031, Lagos est toujours une capitale où la pauvreté règne en maître avec son corollaire, les trafics en tous genres, dès le plus jeune âge. Dans cet environnement hostile, Sékou Williams, jeune instituteur tente d’éduquer les enfants qui lui sont confiés. Sa vie et celle de sa famille vont se retrouver totalement chamboulées par une déferlante venue de l’océan, provoquant de nombreuses victimes et des milliers de personnes sans abri.
Cette lame va avoir des répercussions qui vont très vite dépasser les limites tant géographiques que politiques de nos principaux protagonistes.
La lame, comme le montre la magnifique couverture du livre est aussi celle d’un couteau, qui peut menacer, trancher, tuer. Cette lame-là viendra ponctuer les histoires d’hommes, de femmes d’enfants qui vont s’entrecroiser.
500 et quelques pages, 77 chapitres courts, une construction ambitieuse, complexe mais qui ne perd jamais le lecteur et un final de haut vol, voilà ce que vous trouverez en lisant ce thriller plus que brillant.
J’ai particulièrement aimé le volet géopolitique de ce roman ainsi que les nombreux thèmes abordés ; qu’ils renvoient au côté obscur de l’être humain comme à sa face lumineuse et porteuse d’espoir : la trahison, la vengeance, la haine, la quête du pouvoir et donc aussi la force des promesses, l’engagement, l’amitié, l’amour, la famille.
Ce roman possède un souffle incroyable, il vous fera frémir, vous touchera et plus que tout, il vous fera réfléchir à la direction que pourrait prendre ce drôle de paquebot sur lequel nous sommes tous embarqués.

L'auteur


Saint-Maur en Poche - Juin 2019
Après plusieurs années passées dans la presse magazine et diverses rédactions online, Frédéric Mars a quitté le journalisme et la photo pour ne se consacrer qu'à son travail d'auteur de livres.
Outre ses romans, il a publié plus d'une quarantaine d'essais, documents et livres illustrés, sous diverses identités. 
Il est l'auteur du thriller Les marcheurs, sorti en 2018 à La Mécanique générale.
Ainsi, depuis 2018, Quanaaq, sa série islandaise publiée chez La Martinière cartonne, sous le pseudonyme de Mo Malø.
C'est également lui qui se cache derrière le pseudo féminin d'Emma Mars, avec dernièrement la série romance Sign of Love, aux éditions French Pulp.
En résumé, Frédéric Mars est un auteur touche à tout, prêt à explorer de multiples univers.

mardi 15 octobre 2019

L’inconnue de l’équation






de Xavier Massé paru le 16/05/2019 aux Editions Taurnada, Collection Le tourbillon des mots, 9,90 euros (234 p.)
Quatre heures. La police n'a que quatre heures pour démêler ce qui ne semblait être au départ qu'un simple drame familial : un couple, Juliette et François, retrouvé carbonisé, leur fils, Julien, gisant au sol.
Deux salles d'interrogatoires, deux témoins de la tragédie : la mère de François et une flic déjà présente sur les lieux. Deux versions, deux visions différentes.
Accident, meurtre, ou vengeance ?
Une toile d'araignée va se tisser peu à peu et d'une simple énigme va surgir une équation… aux multiples inconnues.



La chro de Flo 

L’inconnue de l’équation est un livre habile qui se lit vite et bien !! 

Juliette et François sont morts sous les yeux d’Amandine Binger, policière arrivée sur les lieux. Julien, le fils est en soins intensifs. Mireille, la grand-mère n’a pu rejoindre la maison de son fils à temps mais recevait les confidences de ce dernier.

Comment et pourquoi un couple uni en est arrivé à se déchirer ainsi ?
Xavier Massé a su élaborer une histoire très prenante grâce à des chapitres courts, qui alternent les questions posées lors des gardes à vue des deux personnes qui détiennent peut-être la vérité sur le drame qui a frappé la famille Conut.  Migue, policier expérimenté lance à son équipe l’idée d’interroger séparément ces deux femmes qui ignorent chacune la présence de l’autre. À partir de cet instant, le lecteur est pris en tenaille et vous vous doutez bien que les rebondissements, les voies de garage, vous allez en rencontrez en suivant les auditions menées par les policiers Migue et Dida en tête, aidés par Brossard. Tous les trois vont s’employer à traquer la vérité.

J’ai eu un plaisir énorme à entrer dans le jeu concocté par Xavier Massé malgré quelques petites imperfections au niveau du style et des situations ou appellations qui ne sont plus appropriées dans le milieu policier mais j’en suis ressortie avec un regard très positif car il s’agit de son deuxième roman.

Je suis convaincue que Xavier Massé a une gros potentiel et qu’il va nous surprendre avec un prochain romain où fond et forme seront au top !





lundi 7 octobre 2019

L'important n'est pas la chute

Ce week-end est paru sur Collectif Polar : Chronique de nuit, mon avis de lecture pour

L'important n'est pas la chute de Guillaume Ramezi, paru aux Editions French Pulp en mars 2019.



Une lecture particulièrement agréable, avec la chronique complète, extrait, bio de l'auteur en suivant le lien ci-après :



Salon L'escargot Noir, à Sens, Mai 2019 - Avec Guillaume Ramezi à gauche et Laurent Malot à Droite sur la photo



J’ai croisé Guillaume Ramezi une première fois à Nemours puis à Sens (voir photo ci-dessus) et je me suis tout de suite sentie attirée par son deuxième roman.

Camille Lambert et son équipe (Romans, Bourdieu et Malika) sont appelés un dimanche matin pour rejoindre un petit aérodrome de l’Oise.

Un accident a eu lieu : Thomas Laverne, riche chef d’entreprise a sauté en parachute mais celui-ci ne s’est pas ouvert correctement. Thomas Laverne a été emmené à l’hôpital, dans un état très grave. L’homme qui partageait l’avion de saut a disparu. C’est Claire Laverne, l’épouse de la victime qui a souhaité confier l’enquête à la jeune capitaine, cette dernière ayant mené l’enquête sur la disparition d’Héloïse, l’une des deux filles du couple, quelques années plus tôt.

Je ne vous cacherai pas que l’accident n’en est pas un et que la recherche de la vérité ne sera pas si évidente.

L’écriture de Guillaume Ramezi est très agréable, fluide et oscille entre noirceur et légèreté avec ses clins d’œil à d’autres auteurs.

J’ai donc passé un très bon moment de lecture et me garderai bien de dévoiler les thématiques traitées par l’auteur, au risque de déflorer tout l’intérêt de l’intrigue.

Pour en savoir plus, il vous faudra donc le lire vous aussi.



dimanche 22 septembre 2019

Un sac



paru le 20/01/2017 chez Milady, 6,90 euros ( 278 p.)
En pleine nuit, une femme attend face au Panthéon, seule, un petit sac dans ses bras frêles qu'elle serre comme un étau. Cette femme, c'est Anna-Marie Caravelle, l'abominable, l'Affreuse Rouquine, la marginale.
Lorsque, vingt-quatre ans plus tôt, Monique Bonneuil décide de prendre en charge, en secret, à l'insu du reste du monde, l'éducation de la petite Anna-Marie, fille d'un suicidé et d'une folle à lier, elle n'imagine pas encore le monstre qu'elle abrite sous son toit et que, lentement, elle fabrique. La petite fille, poussée par ses démons, hantée par son histoire, incapable de distance, tue, un peu, beaucoup. Elle sacrifie, règle ses comptes, simplement.
Mais que fait-elle là, cette jeune femme agenouillée en plein Paris, au beau milieu de la nuit ? Et que contient ce mystérieux sac qui semble avoir tant d'importance ? 

Voici l'histoire d'Anna-Marie Caravelle.

L’auteure
Solène Bakowski est née à Paris en 1981.

Titulaire d'une licence de chinois et d'une maîtrise de français langue étrangère, elle a, pendant un temps, partagé sa vie entre la France et la Chine avant d'embrasser la carrière de Professeur des Ecoles. 

Elle est l’auteure de 5 romans, dont un avec sa comparse de plume Amélie Antoine, (Avec elle, sans elle, paru en novembre 208 chez Michel Lafon).

Solène Bakowski a rejoint Metropolis Thriller et son prochain roman (Miracle) est prévu pour le 17 octobre 2019.

(Salon L'Escargot Noir, Sens - mai 2019)
La chro de Flo 
J’ai rarement lu un livre avec autant de rapidité, d’avidité ! Pour moi, ce livre est un bijou, un gros coup de coeur. 
Les raisons … 
  • L’histoire elle-même : d’entrée de jeu, je me doute que l’histoire ne sera pas gaie, que l’issue sera plutôt sordide, noire mais à quel point ? Prenez une jeune femme, dont la naissance ne fut pas un enchantement loin de là, née d’un père qui décida de se suicider quelques mois avant sa naissance et d’une mère, sidérée par ce drame atroce, qui va se réfugier dans le silence, l’inertie physique, intellectuelle et émotionnelle vis-à-vis de son enfant.
Moni, voisine aide-soignante, va prendre sous son aile la future mère puis l’enfant … Mais l’histoire d’Anna-Marie Caravelle ne va pas ressembler à un conte de fées. Vous voulez une histoire qui vous parle de maternité, d’amour, de jalousie, d’espoirs nourris, de déceptions, de décisions fortes et d’actes impardonnables, l’histoire d’Anna-Marie, c’est tout cela. 
  • Le lieu : Paris, et quelques quartiers emblématiques : la Bastille, Pigalle. Paris, ses trottoirs, ses réverbères, ses piaules miteuses, ses beaux quartiers, sa faune, … Cette cohabitation m’a encore sautée aux yeux aujourd’hui entre beauté de notre capitale multiséculaire, population et touristes aisés, et SDF, mendiants dans les couloirs du métro, odeurs d’urine dans certains recoins. Juxtaposition de la chance de certains et de la galère d’autres. Un sac nous parle de ceux qui seraient plutôt dans la seconde catégorie, auxquels la vie réserve des surprises rarement sympas.
  • L’écriture de Solène Bakowski m’a littéralement envoutée. Crue et poétique à la fois, travaillée tout en restant fluide, ne tombant jamais dans l’excès. Fan absolue de littérature noire, j’ai un penchant net pour les romans plutôt courts et là, en 277 pages, j’ai savouré chacune, tant pour le fond que pour la forme. Aucune longueur, pas de manque non plus. La tension est entretenue du début à la fin sans que l’auteure n’ait eu besoin de recourir aux outils classiques du genre. Quelques chapitres correspondant au présent d’Anna-Marie viennent ponctuer son histoire, si terrible.


Je ne saurais que vous inviter à plonger les yeux dans les pages de ce roman qui m’a bluffée. 

Extrait
« Ce sac, ce satané sac ne s’imagine pas le vide qu’il laisse. Il creuse la femme autant qu’il l’avait comblée autrefois. L’amour qu’il recouvre est immense ; sa perte est insondable.

Elle lit cette phrase qui lui fait face, encore et encore : Aux grands hommes, la patrie reconnaissante. Elle se demande ce qu’est la grandeur. Elle se demande si elle est palpable, reconnaissable, mesurable. Elle se demande si on naît grand ou si on le devient. Elle se demande si le martyre peut faire grandir.elle se demande si ceux qui n’accompliront jamais rien par manque de temps, de chance ou d’occasion valent moins que les autres. Elle voudrait savoir qui, du monument gigantesque ou de l’homme minuscule, éclabousse l’autre et lui fait l’aumône d’un peu d’éternité. »



jeudi 19 septembre 2019

Grand froid



paru le 23/11/2018 
aux Editions Nouvelle Bibliothèque, 18 euros (367 p.)

Le jour où sa mère est retrouvée morte, la vie de Lucas bascule. 
Délaissé par la police qui conclut à un suicide, ses doutes l’incitent à surmonter sa douleur pour mener sa propre enquête. La lettre anonyme qu’il reçoit confirme ses soupçons : quelque chose ne tourne pas rond. Et lorsqu’un mystérieux individu s’attaque à ses proches, il n’a plus qu’une solution : lui échapper et tout faire pour établir la vérité…

Grand froid a été finaliste du concours thriller VSD-Michel BUSSI 2018. Il s'est classé premier au terme du vote de la communauté de lecteurs.

L’auteur 
Cyril Carrère est féru de culture, d'innovation et de sport ; l'écriture le passionne depuis son plus jeune âge. 
Originaire de Nîmes et vivant aujourd'hui à Tokyo, Cyril Carrère livre avec Le glas de l'innocence un premier thriller, très remarqué puisqu’il termine finaliste du concours "Derrière les portes" sur la plateforme Fyctia, présidé par B.A Paris. 
Il a rejoint Metropolis Thriller en juin 2019. Son troisième roman paraîtra en 2020.
Saint-Maur en poche (juin 2019)

Saint-Maur en poche (juin 2019) 

Nogent-Le-Retrou (juin 2019)

La Chro de Flo

Je découvre la plume de Cyril Carrère avec son deuxième roman et le moins que je puisse dire c’est que le jeune homme a du talent ! Voici un thriller vraiment punchy, inspiré de faits réels, comme me l'a précisé son auteur lors d'une rencontre à Nogent-Le-Retrou !
La vie de Lucas, jeune homme urgentiste nantais bascule le 7 octobre 2014 avec la mort de sa mère. Il va se retrouver propulsé dans une course contre la mort, la sienne et elle sera pavée hélas de nombreuses victimes.
367 pages plus tard, j’ai suivi 57 jours de l’existence de Lucas et pas un moment de répit, non, aucun. J’aurais même souhaité une suite, tiens (gros clin d’œil à l’auteur) !
Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé. Cyril Carrère déroule son intrigue sans aucun temps mort et tous les personnages principaux sont très attachants. Mention particulière pour le tandem Lucas-Loïc qui fonctionne particulièrement bien. On sent très vite qu’une amitié sincère se noue entre ces deux hommes, le médecin et le flic.
Je n’en écrirai pas plus car il ne faut pas spoiler mais je vous invite à faire connaissance avec Lucas, Loïc, Jipé, Alisa et quelques autres.
Et puis je vous invite aussi à rencontrer l’auteur qui, bien que vivant au Japon, revient régulièrement en France pour participer à des salons. Vous ne le regretterez pas, Cyril Carrère est en effet un auteur passionnant et d’une grande gentillesse. J’ai hâte de découvrir l’évolution de son écriture dans son prochain roman !

Extrait 

« La brise le mordit comme pour le sommer d’accélérer le pas. Lucas fit le vide à l’intérieur de lui afin de se préparer à cette dure journée. Le centre-ville se dessina devant lui. L’odeur des pâtisseries qui s’échappait de sa boulangerie favorite termina de le ramener à la réalité. Son estomac grommelait en quête de quoi tenir la distance, lui qui était mis au supplice depuis la nouvelle fatidique. Il succomba et acheta son traditionnel chausson aux pommes avant d’arriver rue des Carmes, devant la petite bâtisse ocre des années quarante qu’il affectionnait. Son cocon. L’endroit où il pourrait tenter de faire le ménage dans ses pensées obscures.
La nostalgie le rattrapa en pensant aux soirées passées ici avec sa mère. Un rien suffisait à creuser le vide béant causé par sa disparition.
Il ne fit pas attention à la personne qui l’observait, à quelques mètres  de là. Une fois dans le hall, Lucas sortit machinalement son jeu de clés et ouvrit sa boîte aux lettres. Il ne pouvait plus ignorer son courrier plus longtemps. L’oeil hagard, il découvrit pêle-mêle des publicités pour des restaurants japonais et indiens, pour des kebabs, une liste des numéros d’urgence pour le département de la Loire-Atlantique, ainsi qu’une enveloppe qu’il devinait être sa quittance de loyer pour le mois de septembre. Il remarqua un bout de papier coincé entre deux tracts publicitaires. Il commença à le mettre en boule par réflexe, avant de remarquer les mots écrits en grosses lettres rouges. »

samedi 14 septembre 2019

Dans la toile de Vincent Hauuy


Dans la toile de Vincent Hauuy, paru le 29/04/2019 aux Editions Hugo Thriller,  19,95 euros (395 p.)
Isabel Gros est une miraculée. Seule survivante d'une fusillade, elle a passé deux semaines dans le coma. Contrainte d'abandonner sa carrière de critique d'art et ne supportant plus la vie citadine, elle quitte Paris avec son mari, pour s'installer dans leur nouveau chalet, au cœur des Vosges. Souffrant de graves séquelles, Isabel pense se reconstruire grâce à la peinture. Mais le malaise qu'elle ressent dès son arrivée va rapidement se transformer en terreur.
" Un vrai talent d'écriture. " Michel Bussi



Les Chro de Flo : un thriller à s'en lécher les babines 😍 !

Un thriller dévoré en moins de 3 jours … la faute à l’auteur, qui sait jouer avec ses lecteurs et les obliger malgré l’heure tardive à lire encore un chapitre, puis un autre ….
Vincent Hauuy a tissé une toile complexe à souhait dans laquelle je me suis empêtrée et c’est jubilatoire. Et quelle ambiance !
Je connais la Lorraine mais peu les Vosges et pour le coup, la fan de verdure et de tranquillité que je suis confirme qu’elle fuira un lieu comme Plainfaing. C’est pourtant dans un hameau isolé, perdu dans la forêt qu’Isabelle Gros va tenter de se reconstruire suite à la fusillade dont elle a été l’une des seules rescapées mais qui lui a laissé de fortes séquelles psychologiques. Franck, son mari médecin est là pour l’épauler mais rapidement Isabelle se sent mal dans ce chalet où les heures s’égrènent lentement et où ses angoisses remontent …Nous allons la suivre dans ses moindres faits et gestes, ses pensées, de nuit comme de jour, ses questions, ses craintes, ses angoisses, … Vincent Hauuy écrit avec une précision chirurgicale et nous décrit avec des mots toujours choisis à bon escient chaque sensation, chaque pensée d’Isabelle. J’ai eu peur pour elle, mais surtout j’ai eu peur comme elle, car ses sensations physiques si destructrices, et bien, elles me parlent.
La tension monte progressivement mais sûrement et dans le dernier tiers, le scénario devient plus complexe, subtil et là, impossible de lâcher le livre !


Impossible d’en dire plus mais Vincent Hauuy nous montre avec brio qu’il est un formidable conteur, capable de construire une fin vraiment réussie. Bravo !


L’auteur

Vincent Hauuy est un concepteur de jeux vidéo, romancier et scénariste.



Il est titulaire d'un master en information et communication à l'Université de Metz en 2000.

Le tricycle rouge, son premier roman, a obtenu le Prix VSD-RTL du meilleur thriller français 2017. Il récidive avec une nouvelle enquête, Le brasier, publié en 2018.


Vincent Hauuy a vécu avec sa famille à Montréal, au Québec, où il a travaillé dans le monde du jeux vidéo, de 2012 à 2018. Il vit maintenant au Portugal.

Extrait :
"Et encore, un camion de déménagement doit venir nous livrer de nouveaux meubles - un canapé d’angle et une table ovale en chêne massif pour le salon - commandés quelques jours avant notre départ.

Ce désordre ne me dérange pas. Bien au contraire. 

Une partie de moi  aimerait que la maison reste ainsi, coincée dans cet état intermédiaire, une stase entre deux vies, avant que le mobilier ne se place, que les pièces ne se vident et que les grands volumes ne m’écrasent.

J’ai peur qu’à l’angoisse de la solitude ne s’ajoute celle de la vacuité ; les deux mâchoires d’un même étau dont je subirai la pression constante ces prochains jours. D’ailleurs, je pense qu’une aide à domicile serait plus adéquate qu’une aide-soignante.

Je sors de la douche et je prends ma tension pour la deuxième fois de la matinée.

16/90. C’est trop haut. Elle a pourtant tendance à diminuer après une bonne douche.

Une quart d’heure plus tard, les cheveux encore humides et prisonniers d’une serviette en coton, je quitte la mezzanine qui domine le salon et, attirée par l’odeur du pain grillé émanant de la cuisine, je descends les escaliers qui forment un angle droit à mi-parcours.

Je fais glisser ma main sur la poutre verticale accotée à la rambarde ; un large morceau de bois brut fissuré sur sa longueur qui traverse les deux étages pour finir à l’apex de la toiture en triangle. La colonne est rejointe par deux autres linteaux horizontaux ornés de casseroles et poêles en cuivre. Un contraste supplémentaire dans cette maison dont la décoration est à la croisée du kitsch et de la modernité. Ici, les rondins vernis côtoient le métal brossé, les têtes d’animaux empaillés surplombent une cheminée dernier cri  qui trône au centre du salon. Et bien sûr, il y a les divers nains de jardin, équipés de brouettes, de pioches ou de haches. Une des premières horreurs que j’évacuerai de ma cour.

Je tente d’imaginer la famille qui vivait ici avant nous.

Franck m’a appris que le chalet avait été construit dans les années quatre-vingt par un jeune couple d’une vingtaine d’années. Ils y sont restés pas loin de trente ans avant de le mettre en vente. Je me demande à quelle date ils ont déménagé et pourquoi ils ont laissé autant de choses. Canapé-lit dans le salon, affaires de toilette dans la salle de bains. Dans la cuisine nous avons retrouvé casseroles, couverts et assiettes, ainsi qu’une batterie de couteaux incomplète - il en manquait un-, sans compter la nourriture dans le réfrigérateur. Leur départ doit être récent. Ils étaient sûrement pressés ?

Ils n’ont eu qu’une fille. D’ailleurs, je soupçonne que la chambre mansardée était la sienne ; certainement une ado, au vu de la décoration."